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David Hockney 25

David Hockney 25 – Do remember they can’t cancel the spring. Rétrospective de l’œuvre de David Hockney à La Fondation Louis Vuitton – Suzanne Pagé, directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton, commissaire générale – Sir Norman Rosenthal, commissaire invité – François Michaud, conservateur à la Fondation Louis Vuitton, commissaire associé, assisté par Magdalena Gemra – avec la collaboration de Jean-Pierre Gonçalves de Lima et de Jonathan Wilkinson, pour le studio David Hockney – Jusqu’au lundi 1er septembre 2025, nocturne le 29 août – Derniers jours.

27th March 2020, No. 1 – (1)

C’est une exposition de grande envergure qui est présentée à la Fondation Vuitton depuis le printemps dernier et qui ferme ses portes dans une douzaine de jours. Plus de quatre cents tableaux et installations sont ici montrés, émanant principalement de l’atelier de David Hockney et de sa fondation, des prêts de collections internationales, institutionnelles ou privées. Tous les espaces de la Fondation Vuitton sont investis par l’œuvre de l’artiste, réalisée de Bradford à Los Angeles, passant par Londres, Paris et la Normandie. L’œuvre est immense et David Hockney s’est lui-même beaucoup impliqué dans la réalisation de l’exposition, « la plus importante qu’il ait jamais eue » a-t-il commenté. Son œuvre est multiforme, c’est une véritable danse des couleurs.

Né en 1937 à Bradford, ville du textile, dans le Yorkshire de l’Ouest au Royaume-Uni, David Hockney se met à dessiner très tôt, intègre l’école d’art de sa ville dès l’âge de seize ans puis part étudier au Royal College of Art de Londres, à vingt-deux ans. Il découvre les musées et entre dans l’effervescence artistique du moment par le figuratif, qui ne le quittera pas. Il débute en 1955 comme dessinateur, à l’encre, au crayon et au fusain, peint ensuite à l’huile et à l’acrylique. Il a fait siennes aujourd’hui toutes les technologies et réalise des dessins photographiques, à l’ordinateur, sur iPhone et iPad, ainsi que des installations vidéo.

On entre dans l’œuvre par les quinze premières années de son travail, de 1950 à 1964, avec, ouvrant le parcours, le portrait de son père, austère et dans des tonalités sombres, Portrait of My Father, (1955). Très tôt, dans les années 60, David Hockney révèle son homosexualité et joue avec les interdits, se plongeant dans la lecture des poètes, notamment Walt Whitman et Constantin Cavafy. C’est une époque où il voyage beaucoup et rencontre de nombreux artistes – Florence, Rome, Berlin, l’Égypte, New-York, il nourrit ainsi son œuvre. « Mon art doit rendre compte de la beauté du monde » dit-il.

Représenté par la Kasmin Gallery, David Hockney s’installe à Los Angeles en 1964. Il travaille sur le thème de la piscine qu’il affectionne particulièrement et qu’il développe avec A Bigger Splash, (1967) une acrylique sur toile, ainsi que Portrait of An Artist (Pool with Two Figures), piscine avec deux personnages, où apparaît le thème du double qu’il reprendra à différentes reprises. Il s’installe ensuite à Paris, en 1973 où il reste cinq ans et où il rencontre là encore, beaucoup d’artistes. Il expose au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris et au Musée des Arts Décoratifs, avant de retourner à Los Angeles, en 1978.

Portrait of My Father – (2)

C’est aux États-Unis que David Hockney peint de grands paysages qui transforment son regard, entre 1980 et 1990. Il remporte un vif succès et acquiert une reconnaissance internationale en 1988, par la rétrospective qui lui est consacrée au Los Angeles County Museum of Art, présentée ensuite au Metropolitan Museum of Art (le MET) de New-York puis à la Tate Gallery de Londres. Ainsi Le Nichols Canyon ou encore les soixante panneaux peints du Bigger Grand Canyon plus tard, en 1998, une fresque de sept mètres de large composée de soixante toiles assemblées. À partir de 1990 il navigue entre Los Angeles et Bradford où il se plaît à retourner et s’y installe en 1999, à la mort de sa mère à laquelle il était très attaché. Là il cherche, à travers diverses techniques, à transcender les paysages et à témoigner de l’intime. Il décline les saisons dans toutes leurs variations, travaille en extérieur, comme les Impressionnistes, dans un retour aux techniques traditionnelles du fusain, de l’aquarelle, de l’huile tout en introduisant dans son travail la photographie et l’informatique.

Portrait of an Artist (Pool with Two Figures) – (3)

La chronologie s’interrompt, l’exposition nous entraine ensuite au cœur des vingt-cinq dernières années du travail de l’artiste, c’est une volonté de David Hockney de placer le visiteur face au présent ou au passé proche de son parcours et de l’œuvre, à travers la Californie, Londres, le Yorkshire de son enfance et la Normandie où il vit de 2019 à 2023. Il y est aux aguets des saisons et contemple les arbres fruitiers du jardin, les clos normands. À travers vingt-quatre dessins à l’encre il raconte cet environnement quotidien. À compter de 2009, l’artiste introduit dans son travail, au-delà des techniques traditionnelles, l’ordinateur, l’IPhone et l’IPad. Ainsi, dans ses peintures sur IPad, il montre la floraison d’un cerisier. « Il y a un grand cerisier dans le jardin. Je pourrais le suivre depuis les premiers bourgeons jusqu’aux fruits. C’est le sujet le plus excitant que je connaisse, de l’arbre nu à l’arbre chargé des fruits » dit-il. Il travaille le portrait par la technique du dédoublement, et conçoit aussi des portraits de fleurs. Il joue avec les échelles, sur les écrans et dans son œuvre.

Plus loin dans l’exposition on se trouve face au Great Wall, né à partir des années 2000 et qui, au fil de ses recherches se transforme en histoire de la peinture, du XVème siècle à aujourd’hui à partir de photocopies laser couleurs. Il établit cette chronologie du portrait occidental couvrant huit siècles de peinture. Le dialogue avec les peintres a toujours été au cœur de ses préoccupations et de sa démarche, les anciens comme les contemporains, c’est ce qu’on peut voir sur ce mur d’images allant de Fra Angelico à Picasso, en passant par Van Gogh.

Dans une autre galerie de la Fondation on arrive dans une salle de danse et de musique dans laquelle un miroir renvoie une vidéo de danseurs, parallèlement à dix-huit écrans juxtaposés montrant un paysage diffracté, au regard décalé. Puis on entre dans l’univers de l’opéra pour lequel se passionne David Hockney et qui prête à la présentation de ses dessins et décors, dans la galerie monumentale de la Fondation Vuitton, avec entre autres The Rake’s Progress, de Stravinsky et La Flûte enchantée, présentés, le premier en 1975, le second en 1978, au Festival de Glyndebourne ainsi que son travail autour d’une soirée d’opéras français, au Metropolitan Opera de New-York en 1981 avec Parade, de Satie, Les Mamelles de Tirésias de Poulenc et L’Enfant et les Sortilèges de Ravel. Les lumières contribuent à la mise en valeur de l’œuvre.

Hockney Paints the Stage (4)

Les dernières créations de David Hockney, After Munch : Less Is Known Than People Think, inspiré du peintre norvégien, auteur du Cri et After Blake : Less Is Known Than People Think à partir des dessins de Blake pour la Divine Comédie de Dante ferment le parcours, dans la dernière galerie de la Fondation

Chaque galerie traversée, chaque époque, chaque technique mobilisée ouvre sur une construction du tableau et une multiplicité de couleurs, emblématiques de l’artiste. Bigger Trees Near Warter or/ou Peinture sur le motif pour le nouvel âge post-photographique, fresque monumentale réalisée en 2007 en est un exemple éblouissant avec ses arbres bien alignés bien coiffés, aux multiples couleurs, derrière lesquels deux petites maisons du Yorkshire aux toits bleu et vert émergent. « D’une certaine manière, ces peintures du Yorkshire sont nées de l’idée des grands espaces américains » révèle l’artiste.

L’univers pictural de David Hockney a toujours été mû par la recherche de la figure humaine, principalement à travers la figure de ses proches, amant, amis, famille, mais aussi à travers ses autoportraits – dont un certain nombre sont montrés dans l’exposition, passant de l’introspection à l’éclosion des couleurs. Ses paysages flamboyants, son obsession pour les fleurs, ses références à d’autres artistes peintres à travers les siècles sont déclinés avec beaucoup de finesse et d’intelligence dans le parcours proposé, par la relation entre les thèmes et les couleurs mise en exergue par l’artiste dans son dialogue avec les équipes de la Fondation Vuitton et la Commissaire d’exposition, Suzanne Pagé, qu’il faut saluer.

 Brigitte Rémer, le 12 août 2025

Visuels : (1) David Hockney, 27th March 2020, No. 1 – iPad painting printed on paper, mounted on 5 panels Exhibition Proof 2 – 364.09 x 521.4 cm (143.343 x 205.276 Inches) © David Hockney – (2) David Hockney, Portrait of My Father 1955 – Oil on canvas – 50.8 x 40.6 cm (20 x 16 Inches) © David Hockney – Photo Credit: Richard Schmidt – The David Hockney Foundation – (3) David Hockney, Portrait of an Artist (Pool with Two Figures), 1972 – Acrylic on canvas – 213.36 x 304.8 cm (84 x 120 Inches) © David Hockney – Photo Credit: Art Gallery of New South Wales / Jenni Carter – (4) Hockney Paints the Stage, 2025 – Création de David Hockney & Lightroom – Conception 59 Productions – Vue d’installation de l’exposition David Hockney 25, galerie 10, niveau 2, salle Hockney peint l’opéra, exposition présentée du 9 avril au 31 août 2025 à la Fondation Louis Vuitton, Paris © David Hockney © Fondation Louis Vuitton / Marc Domage – (5) David Hockney, Bigger Trees near Warter or/ou Peinture sur le Motif pour le Nouvel Age Post-Photographique, 2007 – Huile sur 50 toiles (36 x 48″ chacune) 457,2 x 1219,2 cm (180 x 480 pouces) © David Hockney – Crédit photo : Prudence Cuming Associates Tate, Royaume-Uni.

Bigger Trees near Warter  – (5)

Rétrospective David Hockney 25 – Do remember they can’t cancel the spring : Commissariat Suzanne Pagé, directrice artistique de la Fondation Louis Vuitton et commissaire générale – Sir Norman Rosenthal, commissaire invité – François Michaud, conservateur à la Fondation Louis Vuitton, commissaire associé, assisté par Magdalena Gemra – Avec la collaboration de Jean-Pierre Gonçalves de Lima et de Jonathan Wilkinson, pour le studio David Hockney – Catalogue de l’exposition : David Hockney, réalisé par Norman Rosenthal pour les éditions Thames Hudson Gb et Fondation Louis Vuitton (49,90 euros).

Fondation Louis Vuitton, prolongée jusqu’au lundi 1er septembre.  Lundi, mercredi et jeudi de 11h à 20h, vendredi de 11h à 21h, samedi et dimanche de 10h à 20h (fermeture le mardi) – Nocturne le vendredi 29 août 2025 – 8, avenue du Mahatma Gandhi, Bois de Boulogne, 75116 Paris – métro : ligne 1, station Les Sablons, sortie Fondation Louis Vuitton – navette de la Fondation : départ toutes les 20 minutes de la place Charles-de-Gaulle Étoile – tél. : +33 (0) 1 40 69 96 00 – site : www.fondationlouisvuitton.fr