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Le Silence et la peur

© Simon Gosselin

La vie, la musique et l’engagement de Nina Simone – Texte et mise en scène David Geselson, Compagnie Lieux-dits, au Théâtre de la Bastille, en français et en anglais surtitré.

 « Toute ma vie j’ai voulu crier mon sentiment d’être emprisonnée. Je connais le silence qui crée cette prison, comme chaque Noir le connaît » disait Nina Simone, en 1967. Pianiste, chanteuse, compositrice et arrangeuse, elle est dans le premier carré des plus grandes chanteuses de jazz de l’histoire avec Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan et Billie Holiday. Son style singulier est issu de la fusion de chansons gospel, du jazz et de la pop avec la musique classique. Derrière son exceptionnel talent musical, le spectacle témoigne de son parcours personnel et de son engagement face au racisme et à la ségrégation dont elle a comme tant d’autres, été victime, mêlant réalité et fiction. Issue d’une lignée Cherokee ayant survécu au génocide des Amérindiens – son arrière-arrière-grand-père était un esclave noir africain, Nina Simone était devenue l’une des porte-voix du mouvement afro-américain pour la défense des droits civiques. On la voit ici crier son indignation.

Peu de musique et peu de chant au cours du spectacle, une présence exceptionnelle de l’actrice qui interprète le rôle de Nina Simone Dee Beasnael, Américaine d’origine ghanéenne s’exprimant en anglais – pour laisser percevoir le talent, les misères, les troubles et les rébellions de cette grande figure iconique, au gré des situations et des rencontres avec les personnes-clés de sa vie. Le salon-salle à manger est déjà habité avant que le public s’installe, un canapé, une grande table et des chaises, un miroir et de petites lampes d’atmosphère. La scénographie de Lisa Navarro et les lumières de Jérémie Papin se modulent au fil de l’action laissant un espace vide pour certains monologues où Dee Beasnael, face au public, nous prend violemment à témoin.

© Simon Gosselin

Il y a de la fluidité dans les entrées et sorties des personnages, cinq acteurs d’un générique métissé et bilingue arrivant de différents points pour prendre place dans ce cruel manège de la vie et de l’Histoire qui s’inscrit chronologiquement dans cette biographie : le père de Nina Simone, John (Kim Sullivan), son premier amour Edney qui devient Andy le manager qu’elle épouse et dont le langage se transforme en violence (Jared McNeill), sa profe